Sapin II n’est pas encore à la hauteur des enjeux
Le projet de loi Sapin II a été examiné, le 25 mai 2016, par la Commission des lois. À cette occasion, des mesures, dont certaines s’inspirent de recommandations effectuées par Anticor et Sherpa, ont été votées renforçant ainsi la portée de ce projet de loi. Toutefois, pour répondre à l’objectif ambitieux de lutte contre la corruption, il est souhaitable que d’autres dispositions soient adoptées en plénière.
Les associations Anticor et Sherpa saluent l’adoption d’un régime de protection global et unifié des lanceurs d’alerte bien que perfectible. Il prévoit, par exemple, la protection de l’anonymat, des mesures contre les représailles, un soutien financier pour faire face aux frais de justice ainsi qu’une réparation pour les dommages moraux et financiers. Avec ces mesures, la France reconnaît enfin le rôle essentiel des lanceurs d’alerte.
Malheureusement, les dispositions envisagées pour garantir l’indépendance de l’Agence, de ses membres et organes sont insuffisantes. En outre, les associations agréées ne peuvent toujours pas saisir l’Agence pour des faits de corruption et d’atteinte à la probité. Par ailleurs, les modalités de recrutement, par l’Agence, des experts chargés de réaliser des contrôles dans les entreprises ou mettre en oeuvre la peine de conformité, ne sont pas fixées dans le Projet de loi.
Surtout, la justice négociée en matière de corruption a été introduite par amendement dans ce Projet de loi. La justice négociée conduira à l’impunité des entreprises qui auront simplement payé une amende. Au regard du contexte français, cette mesure est illusoire et risquerait de devenir un impôt sur la corruption plus qu’une réelle menace. En aucun cas, ce mécanisme ne peut être la réponse adéquate au manque d’efficacité de la Justice qui provient de l’absence de l’indépendance du parquet ou encore de la carence des moyens humains et financiers alloués à la lutte contre la corruption internationale.
Les députés doivent donc profiter du passage de ce Projet de loi à l’Assemblée nationale, du 6 au 9 juin 2016, pour améliorer davantage le texte qui n’est, pour l’instant, pas encore à la hauteur des enjeux en la matière.