Un candidat peut-il recevoir des cadeaux ?
Selon un article paru dans le JDD, le 11 mars 2017 : « François Fillon s’habille depuis des années chez Arnys, la célèbre boutique rive gauche, rue de Sèvres à Paris. Mais qui paye ses costumes, blazers et pantalons confectionnés sur mesure ? Selon nos informations, depuis 2012, l’ancien Premier ministre se serait fait offrir pour près de 48.500 euros de vêtements. Sur ce montant, 35.500 euros semblent avoir été réglés en espèces. Les 9 et 10 février derniers, soit moins de quinze jours après la révélation du Penelopegate par Le Canard Enchaîné, deux costumes que François Fillon a fait retirer à la boutique ont, cette fois-ci, été payés par chèque. »
Cet épisode soulève une question inédite : un candidat peut-il recevoir des cadeaux pendant sa campagne ?
Il convient de donner, en l’espèce, les éléments de réponse suivants :
1/ Rappelons, tout d’abord, qu’il est interdit à quiconque de verser à un commerçant plus de 1 000 € en espèces (article D112-3 du code monétaire et financier).
2/ Si le candidat qui reçoit le cadeau siège à l’Assemblée nationale, il doit respecter l’article 7 du code de déontologie des députés : « Les députés doivent déclarer au déontologue de l’Assemblée nationale tout don, invitation à un événement sportif ou culturel ou avantage d’une valeur qu’ils estiment supérieure à 150 euros dont ils ont bénéficié en lien avec leur mandat. » Si le code de déontologie prévoit cette exigence, c’est bien parce que tout cadeau d’une certaine valeur est de nature à créer un conflit d’intérêts, c’est-à-dire une situation d’interférence entre les devoirs du député et un intérêt privé qui, par sa nature et son intensité, peut raisonnablement être regardée comme pouvant influencer ou paraître influencer l’exercice de ses fonctions parlementaires.
3/ Le donateur ne peut exiger une quelconque contrepartie, sauf à commettre le délit de trafic d’influence actif ou de corruption active.
4/ À partir du moment où la chose offerte ne concourt pas directement à l’obtention de suffrages, elle n’est pas concernée par la réglementation des dons (en nature) reçus par un candidat à une élection. Dès lors, rien n’interdit à un candidat de recevoir un ou plusieurs costumes… Par contre, en cas d’élection, il ne pourra pas utiliser les prérogatives que lui confère son mandat pour remercier son bienfaiteur, sauf à commettre le délit de trafic d’influence passif ou de corruption passive.
Bien évidemment, un candidat devrait s’abstenir de se mettre dans une situation de dépendance à l’égard d’une personne physique ou morale. Tout dépend donc de la nature exacte des liens qui unissent celui qui offre et celui qui reçoit.
Mise à jour le 16 mars 2017 :
Le parquet national financier a accordé, le 13 mars 2017, un réquisitoire supplétif contre X aux juges chargés du dossier Fillon pour qu’ils enquêtent sur des soupçons de « trafic d’influence » suite aux costumes offerts au candidat.