Corruption à la FFR : Bernard Laporte et Mohed Altrad déclarés coupables.
Le 8 juin 2022, Anticor s’est constituée partie civile dans l’affaire dit de la « Fédération Française de Rugby » portant sur les liens étroits entretenus par Bernard Laporte, le Président de la FFR, avec l’homme d’affaire Mohed Altrad. L’audience correctionnelle s’est tenue du 7 au 22 septembre 2022 devant la 32e chambre correctionnelle du Tribunal Judiciaire de Paris.
Cette affaire a mis en lumière de façon inédite la corruption qui gangrène le milieu du sport, laquelle n’épargne pas le rugby, malgré « l’esprit du ballon ovale » affiché.
Selon Inès Bernard, juriste d’Anticor, « les infractions graves révélées par ce dossier portent atteinte aux valeurs du sport, dont en premier lieu le respect des règles et du collectif. Elles détériorent aussi l’image d’un secteur qui véhicule pourtant un message puissant : la possibilité d’une émancipation individuelle fondée sur le mérite. »
Lors de l’audience, Anticor a été seule à exercer un vrai rôle de partie civile en formant notamment des demandes d’indemnisation. Par comparaison, la FFR n’a revendiqué aucun préjudice.
L’audience a permis de faire la lumière sur les décisions prises entre 2016 et 2018 par Bernard Laporte, afin de favoriser la société ALTRAD INVESTMENT AUTHORITY (AIA) dirigée par Mohad Altrad ainsi que le club MONTPELLIER HERAULT RUGBY (MHR) dont Mohad Altrad est Président.
Le Président de la FFR aurait en effet, usé à plusieurs reprises de son influence dans des décisions significatives pour le milieu du rugby professionnel en favorisant notamment le rachat du club Gloucester Rugby par Mohed Altrad ou en réformant l’annulation d’un match du Top 14 opposant le Racing 92 au MHR.
En outre, deux contrats conclus entre la FFR et la société AIA ont été passés dans des conditions opaques. L’un portant sur le soutien à la candidature de la France pour l’accueil du mondial de rugby, d’un montant de 1 800 000 euros, a été passé sans appel d’offres préalable. L’autre portait sur la commercialisation de la face avant du maillot de l’équipe de France, pour un montant de 6 800 000 euros par saison.
Ces décisions sont intervenues alors que Bernard Laporte et Mohed Altrad étaient liés par l’intermédiaire de leurs entreprises respectives, BL COMMUNICATION et AIA, par un contrat de partenariat.
La FFR est une association de loi 1901, reconnue d’utilité publique, bénéficiant d’une délégation du ministère des sports. Ainsi, son Président et son Vice-Président sont chargés d’une mission de service public et concernés par les infractions à la probité.
Cet après-midi, le Tribunal a déclaré Monsieur Bernard Laporte coupable de prise illégale d’intérêts, trafic d’influence, corruption passive et recel d’abus de biens sociaux et Monsieur Mohed Altrad coupable de corruption active, trafic d’influence et abus de biens sociaux.
Monsieur Serge Simon a, pour sa part, été relaxé des chefs de prise illégale d’intérêts, ce qu’Anticor regrette au regard de la teneur du dossier.
Le Tribunal a respectivement condamné Messieurs Bernard Laporte et Mohed Altrad à deux ans d’emprisonnement avec sursis et 75 000 euros d’amende et dix-huit mois d’emprisonnement avec sursis et 50 000 euros d’amende.
Une peine d’interdiction d’exercer toute fonction en lien avec le rugby a, en outre, été prononcée à l’encontre de Monsieur Bernard Laporte, conformément aux réquisitions du parquet. Anticor se félicite que ces condamnations écartent Monsieur Bernard Laporte de l’organisation du prochain mondial de rugby, lequel aura lieu en France en 2023, et ce, sauf si ce dernier fait appel. En effet, les peines prononcées n’étant pas exécutoires, un appel permettrait malheureusement à Monsieur Laporte de conserver ses fonctions.