Pacte de corruption présumé entre la SNCF et IBM : Anticor tente de relancer l’instruction
Le 19 avril 2022, l’association Anticor s’est constituée partie civile dans une information judiciaire ouverte au Tribunal judiciaire de Paris depuis juillet 2020. Cette instruction porte sur un possible pacte de corruption entre la SNCF et la multinationale américaine IBM. Anticor s’alarme qu’aucun acte d’enquête n’ait été effectué en bientôt 5 ans.
C’est pourquoi l’association demande de nouvelles auditions et le versement de documents jugés essentiels, afin que la lumière soit faite sur cette affaire.
La SNCF et le géant américain de l’informatique IBM sont suspectés d’avoir noué un pacte de corruption qui aurait permis à IBM d’obtenir de nombreux marchés publics, en contournant les règles européennes de la commande publique.
En 2008, une filiale de la SNCF, GEODIS, a décroché un contrat stratégique pour gérer les opérations logistiques d’IBM. Mais une question se pose : en échange de ce contrat, la SNCF aurait-elle favorisé IBM dans l’attribution de marchés publics ?
En 2010, la SNCF et IBM ont créé une filiale chargée de piloter la sous-traitance informatique de la SNCF, laquelle aurait servi de société-écran pour permettre à la SNCF de passer des marchés de gré à gré avec IBM, sans appels d’offres ni mises en concurrence, et ce, pour plusieurs millions d’euros.
La filiale aurait acheté à IBM des logiciels, pour un montant de 8,5 millions d’euros, en scindant artificiellement le contrat en huit commandes distinctes, afin de contourner le contrôle des services de conformité.
Ces faits, s’ils sont avérés, pourraient recevoir la qualification de corruption et de favoritisme.
En outre, ces commandes auraient été réalisées sans réel besoin du groupe ferroviaire, dans un contexte où les prix proposés par IBM pouvaient être jusqu’à 30% supérieurs à ces concurrents.
Si ces faits sont avérés, ils pourraient être qualifiés de détournement de fonds publics.
Le 5 février 2025, Anticor a adressé une demande d’actes au juge d’instruction. L’association réclame l’audition de témoins clés qui n’ont pas encore été entendus et la production de documents jugés cruciaux pour faire avancer l’instruction.
Au moment du possible pacte de corruption, la SNCF était placée sous le statut d’Établissement Public à Caractère Industriel et Commercial (EPIC), une structure publique qui exerce une activité économique.
Une part importante du financement de la SNCF provient de l’État et des collectivités locales. Or, cet argent public doit être utilisé rigoureusement, dans l’intérêt des citoyens.
En outre, le respect des règles des marchés publics permet de confier les marchés aux entreprises les plus compétentes pour les réaliser, là encore, dans l’intérêt des citoyens.
Les possibles malversations commises au sein de la SNCF préjudicient en premier lieu aux 10 millions de voyageurs qui empruntent quotidiennement ses trains.
« Cinq ans d’instruction et aucun acte effectué. Anticor s’interroge sur cet immobilisme car l’enquête préliminaire avait révélé de potentielles infractions. Sans l’action d’une association agréée, cette potentielle affaire de corruption aurait pu être enterrée, alors qu’elle touche à des faits d’une particulière gravité. Anticor demande que les investigations soient relancées. » Maxence Lambert, juriste d’Anticor