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Agrément d’Anticor : le gouvernement persiste dans l’illégalité

Depuis bientôt un an, Anticor, association de lutte contre la corruption impliquée dans plus de 150 procédures judiciaires, se trouve dépourvue d’agrément anticorruption. Le gouvernement vient une nouvelle fois de se dérober devant la demande d’Anticor pour retrouver sa capacité à agir contre la corruption, en annonçant « mettre en attente » pour une période indéfinie la demande d’agrément formée le 19 janvier 2024.

En juin 2023, l’agrément 2021-2023 d’Anticor a été annulé par le tribunal administratif, en raison de sa mauvaise rédaction par Jean Castex. Cette annulation a été contestée par l’association et la procédure se trouve toujours en cours devant le Conseil d’État. Dès juin 2023, Anticor avait dû déposer une nouvelle demande d’agrément, à laquelle le gouvernement n’a jamais répondu. Anticor a contesté cette absence de réponse devant le tribunal administratif de Paris en janvier 2024.

Aujourd’hui, le gouvernement instrumentalise ces deux contentieux pour ne pas renouveler l’agrément d’Anticor, en dépit du respect par l’association des conditions d’octroi prévues par la loi. 

Contrainte de déposer une deuxième demande d’agrément, Anticor a transmis un dossier le 19 janvier 2024 au Premier ministre, Gabriel Attal. Il en a été accusé réception le 26 janvier 2024.

En application du décret du 12 mars 2014 n°2014-327 encadrant la procédure d’agrément anticorruption, le Premier ministre dispose d’un délai de 4 mois à compter de cette date pour se prononcer sur la demande d’agrément, soit jusqu’au 26 mai 2024.

Toutefois, le 2 mai 2024, la direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la Justice a informé Anticor de la « mise en attente » de sa demande. Le gouvernement prétend réserver sa décision jusqu’à l’issue des contentieux administratifs que l’association a engagés.

Par cette réponse, le gouvernement s’affranchit totalement des textes encadrant la procédure d’octroi de l’agrément anticorruption aux associations.

En premier lieu, le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti se trouve en conflit d‘intérêts pour traiter les demandes d’agrément d’Anticor, en raison d’une plainte déposée à son encontre par notre association en 2018. Ce dernier était donc en déport, par application d’un décret du 2 juin 2022 limitant ses compétences au regard de ses conflits d’intérêts. Aussi, il est particulièrement étonnant qu’une réponse soit apportée par le ministère de la Justice.

En outre, si la décision d’agrément ou de refus doit être prise dans un délai de 4 mois, ce délai peut être prorogé de deux mois supplémentaires à la seule condition que l’instruction du dossier le justifie. Aucune « mise en attente » n’est donc prévue par les textes.

Conditionner l’octroi de l’agrément à l’issue de deux contentieux administratifs revient à porter atteinte au droit à un recours juridictionnel effectif d’Anticor, puisque les contentieux se voient donner un effet collatéral sur une procédure administrative totalement distincte.

Enfin, par cette réponse, le ministère de la Justice invente de toute pièce une condition supplémentaire qu’Anticor devrait respecter pour obtenir un agrément. Or, lesdites conditions, au nombre de 5, sont limitativement prévues au décret du 12 mars 2014.

Nul ne conteste qu’Anticor les respecte toutes tant à la date du 19 janvier 2024 qu’au 2 mai 2024.

Il appartient au seul Premier ministre de décider, à la date du 26 mai 2024, de donner ou pas l’agrément à Anticor.

La réponse du 2 mai 2024 du ministère de la Justice est particulièrement inquiétante. Elle illustre, une fois encore, le peu de considération que porte l’exécutif à la lutte contre la corruption. À quelques semaines de la publication du plan national de lutte contre la corruption, Anticor s’alarme de cette situation et du message envoyé aux citoyens.

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