Affaire COCHET
Philippe Cochet est maire de la commune de Caluire-et-Cuire (Rhône) depuis 2008 et conseiller à la métropole de Lyon.
Il a exercé la fonction de député entre 2002 et 2017. Dans le cadre de cette fonction, il a recruté son épouse, Lætitia Cochet en qualité de collaboratrice parlementaire.
Les députés peuvent employer sous contrat de droit privé des collaborateurs parlementaires, qui les assistent dans l’exercice de leurs fonctions et dont ils sont les seuls employeurs. Ils bénéficient, à cet effet, d’un crédit affecté à la rémunération d’un à cinq collaborateurs.
En pratique, chaque député dispose généralement de trois à quatre collaborateurs répartis entre l’Assemblée nationale et la circonscription, avec un salaire médian autour de 2900€ mensuels.
Or, d’après une enquête conjointe de France Info et Lyon Capitale menée en 2017, l’effectivité du travail de l’épouse de M. Cochet, pour lequel elle a été rémunérée pendant près de 14 ans, n’a pas pu être établie.
Ainsi, Laetitia Cochet bénéficiait d’un salaire de 5593,03€ brut mensuel en comptant les primes, ce qui a poussé une ancienne collaboratrice de M. Cochet à initier un litige prud’homal pour inégalité salariale à l’issue duquel le député a été condamné.
L’enquête a également permis d’apporter de nouveaux éléments susceptibles d’établir le caractère fictif de l’emploi de Lætitia Cochet.
• Soupçons d’emploi fictif
Lætitia Cochet aurait perçu plus du double du salaire moyen des autres collaborateurs du député, malgré un temps de travail largement inférieur.
Cependant, Mme Cochet n’aurait disposé d’aucun bureau ni fonctions, et aucun des membres de l’équipe parlementaire ou même des proches du couple ne semblaient savoir qu’elle était employée à ce titre.
A l’issue de son enquête, le Parquet National Financier estime que la réalité du travail effectué par Mme Cochet n’est pas établie dans le dossier, malgré de menus services ponctuels effectués pour son mari.
Ces faits, s’ils sont avérés, pourraient être qualifiés de détournement de fonds publics, à hauteur de presque 639.000€ issus de l’enveloppe de crédits parlementaires.
• Un possible préjudice pour Pôle Emploi
A la suite de l’adoption de la loi du 15 septembre 2017 interdisant aux parlementaires d’employer un membre de leur famille, Lætitia Cochet a été licenciée de son emploi de collaboratrice parlementaire. A la suite de ce licenciement, elle a effectué une demande auprès de Pôle Emploi pour la perception d’indemnités de chômage. Elle aurait par conséquent perçu entre 23.000€ et 35.000€ par an entre 2017 et 2019.
Néanmoins, le caractère potentiellement fictif de son emploi remettrait en cause le droit de Mme Cochet à ces allocations. Ce seraient alors presque 94.000€ qui auraient été indûment perçus.
La procédure judiciaire : Anticor a déposé plainte auprès du Parquet National Financier le 17 septembre 2021.
Cette plainte a conduit à l’ouverture d’une enquête par le Parquet National Financier en novembre 2021.
Monsieur et Madame Cochet ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel de Paris les 28 et 30 août 2024 pour détournement de fonds publics, fraude aux allocations chômage et recel et complicité de ces délits. Anticor était représentée à l’audience.
Le 11 décembre 2024, Philippe Cochet a été reconnu coupable de détournement de fonds publics. L’ancien député a été condamné à 3 ans d’emprisonnement dont un an ferme par le Tribunal correctionnel de Paris.
Philippe Cochet a également été condamné à cinq ans d’inéligibilité avec exécution provisoire. Il doit donc quitter son mandat de maire de Caluire-et-Cuire, ainsi que son mandat à la Métropole de Lyon.
Son épouse a été reconnue coupable de complicité et de recel de détournement de fonds publics ainsi que de fraude sociale.
Fondement de l’action juridique d’Anticor : détournements de fonds publics et fraude aux allocations chômage
Pourquoi Anticor a-t-elle décidé d’agir dans cette affaire ?
La confiance des citoyens en leurs élus est fragilisée par l’usage irrégulier des deniers publics, et ce, d’autant plus lorsque ces fonds publics devaient servir à mener à bien des mandats d’élus, par le recrutement de personnels qualifiés.
L’adoption de la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, interdisant aux parlementaires d’employer un membre de leur famille « proche », leur conjoint notamment, a permis de mettre un terme à ces situations de conflits d’intérêts.
Anticor propose d’aller plus loin. Lors des dernières élections législatives, l’association a formulé 7 engagements pour un député exemplaire et a invité les candidats à la députation à s’en saisir. L’un des engagements porte sur le refus de toute complaisance pour le recrutement des collaborateurs. Les députés s’engagent alors à choisir des collaborateurs selon leurs capacités, sans autre distinction que celle de leur vertu et de leurs talents et à ne procéder à aucune embauche de complaisance.
Par ailleurs, les fraudes aux aides sociales commises par des élus ou leur entourage sont contraires à l’exemplarité attendue par les citoyens de leurs représentants.