Contrôle des indemnités
Comment contrôler les indemnités de vos élus locaux
Jean-Luc Trotignon, membre actif des instances d’Anticor et conseiller municipal de Rambouillet (78), a rédigé « Mode d’emploi » pour les citoyens vigilants qui souhaitent contrôler les indemnités de leurs élus municipaux, alimenté ensuite par de nombreuses questions laissées en commentaires avec leurs réponses.
Jean-Luc Trotignon, membre actif des instances d’Anticor et conseiller municipal de Rambouillet (78), a découvert début 2009 que son Maire (l’ancien Président du Sénat Gérard Larcher) touchait des indemnités en trop-perçus par rapport au plafond autorisé pour un parlementaire qui cumule avec un mandat local. Suite à diverses actions en Justice, il a même obtenu plusieurs remboursements de ce dernier à la commune.
Suite à de nombreuses sollicitations, il a rédigé une sorte de « mode d’emploi » pour les citoyens vigilants qui souhaitent contrôler les indemnités de leurs élus municipaux, alimenté ensuite par de nombreuses questions laissées en commentaires avec leurs réponses.
A la demande de nombreux adhérents et sympathisants d’Anticor qui m’ont appelé de différents coins de France suite aux remboursements, par le Maire de Rambouillet et Président du Sénat, d’indemnités perçues au-delà du maximum autorisé lorsqu’on cumule des mandats, je vous donne ci-dessous quelques indications pour vous aider à bien contrôler les indemnités de vos élus municipaux.
Jean-Luc Trotignon
Conseiller municipal de Rambouillet
Militant d’Anticor
02-oct-2009
Comment contrôler les indemnités de vos élus municipaux
1 ) Préambule
Tous les articles de loi concernant les indemnités des élus municipaux sont dans le C.G.C.T. (Code Général des Collectivités Territoriales) de l’article L2123-20 à l’article L2123-24-1, articles que l’on peut trouver sur internet.
Ils indiquent que toute indemnité doit passer par une délibération votée par le Conseil municipal. Toutes les délibérations d’un Conseil municipal doivent pouvoir être consultées par tout citoyen (à demander au secrétariat général de la Mairie). Beaucoup de communes affichent les délibérations quelques jours après leur conseil municipal.
2) Le tableau des indemnités en euros
Il doit être joint à toute délibération concernant l’indemnisation d’un seul ou de plusieurs élus un tableau récapitulatif en euros de ce que touche chaque élu indemnisé par mois. C’est ce tableau qui est souvent très difficile à obtenir, bien que ce soit légalement obligatoire (Art. L. 2123-20-1/II du C.G.C.T.), parce que c’est trop de transparence…
Car sinon les délibérations indiquent les indemnisations des élus d’une façon qui en arrangent bien certains, c’est-à-dire d’une façon incompréhensible pour les citoyens : ce sont des pourcentages de l’indice de base de chaque fonction (différent pour le Maire et les adjoints, et différent selon la population de la ville), indice de base qui est lui-même un pourcentage de l’indice de la fonction publique 1015 (régulièrement revalorisé), et pour les conseillers délégués (qui doivent tous être indiqués nominativement un par un) et les conseillers « simples », ce sont des pourcentages de l’écrêtement du Maire et des adjoints (déterminés par le Maire avec « l’accord » des adjoints)… De plus, il faut ensuite majorer le tout pour certaines communes, si elles sont classées touristiques, chef-lieu d’arrondissement, ou autre…
On ne peut donc mieux enfumer le citoyen si on n’indique pas clairement, en euros, ce que touche mensuellement chaque élu avec ce tableau « obligatoire ».
Je vous incite donc, partout en France où il y a des délibérations fixant les indemnités des élus municipaux sans présentation de ce tableau obligatoire, à demander l’annulation de la délibération à votre Préfecture à cause du non-respect de la loi, afin que votre commune soit contrainte de revoter cette délibération avec le tableau en euros.
Si le délai de contestation de la délibération est épuisé (2 mois après son vote), écrivez à votre Maire avec accusé de réception pour qu’il publie ou affiche ce tableau des indemnités des élus, qu’il aurait dû rendre public au Conseil municipal. Un refus ou une non-réponse de sa part dans le délai légal vous ouvrira alors à nouveau une période de recours pour en obtenir la communication publique, même s’il faut aller jusqu’au Tribunal administratif (possible sans avocat).
Si en attendant, vous avez besoin d’un coup de main pour comprendre une délibération sans le tableau, je dois pouvoir vous la traduire en euros, si vous m’indiquez s’il y a des majorations particulières pour votre commune (renseignement qui doit logiquement se trouver sur la délibération et/ou à vérifier auprès du secrétariat général de votre Mairie, ou Préfecture).
Et quand vous obtenez ce tableau, il vaut toujours mieux aussi le contrôler afin de voir s’il est bien exact et s’il correspond réellement à la délibération.
3) Vérification des délégations
Il faut donc aussi aller demander à consulter les arrêtés de délégation du Maire depuis le début de la mandature, au secrétariat général, ce sont des documents publics (certaines communes les affichent un moment).
Ca permet de savoir qui est réellement conseiller municipal délégué ou non, et de contrôler si tous les conseillers délégués sont bien inscrits sur les délibérations des indemnités des élus comme c’est la loi, dès qu’ils sont indemnisés.
A défaut, méfiez-vous : il peut y avoir anguille sous roche, avec un ou plusieurs conseillers municipaux indemnisés à l’insu du Conseil municipal, donc des citoyens… (comme je l’avais découvert également à Rambouillet). Et cela bien que, théoriquement, un Trésorier principal ne puisse régler d’indemnités à un élu sans délibération.
4) Plafond maximum des indemnités pour une commune
Il faut aussi contrôler que le total des indemnités que la commune verse chaque mois à l’ensemble de ses élus ne dépasse pas le plafond autorisé.
Cette enveloppe globale mensuelle ne doit pas dépasser le maximum d’indemnités allouables au Maire et à tous ses adjoints, c’est-à-dire la somme de ce que tous ceux-là pourraient toucher au maximum s’ils n’écrêtaient pas leurs indemnités pour permettre l’indemnisation des Conseillers municipaux délégués.
5) Plafond maximum des indemnités pour un parlementaire qui cumule
Aux termes de la loi organique n° 92-175 du 25/02/92, le député ou sénateur titulaire de mandats ou fonctions électorales locales ne peut cumuler les indemnités correspondantes avec son indemnité parlementaire de base que dans la limite d’une fois et demie cette dernière.
Les indemnités pour mandat et/ou fonction locale(s) sont actuellement ainsi plafonnées pour un parlementaire à 2 735,42 € par mois (au 02/10/09).
Attention, il n’y a pas que les indemnités de Maire, adjoint ou Conseiller délégué, ou Conseiller général… qui doivent être en dessous de ce plafond. Il faut y ajouter les éventuelles indemnités touchées dans les communautés de communes (renseignement public à demander à votre communauté de communes). Et il faut aussi y ajouter, ce qui est souvent plus difficile à obtenir, les indemnités touchées en tant que Président ou membre d’un Conseil d’administration du public ou d’un syndicat intercommunal (voir art. L. 2123-20/II du C.G.C.T.).
Ce plafond à ne pas dépasser pour les activités locales d’un parlementaire qui cumule est régulièrement remis à jour sur les sites du Sénat et de l’Assemblée Nationale aux liens suivants, où vous trouverez également d’autres informations sur les indemnités des parlementaires :
http://www.assemblee-nationale.fr/connaissance/indemnite.asp
http://www.senat.fr/role/senateurs_info/statut.html
6) En cas de difficulté à obtenir des documents de votre Mairie ou Préfecture
Après une réponse négative (écrite) ou une non-réponse dans le délai légal (1 mois), saisissez par courrier le Président de la C.A.D.A. (Commission d’Accès aux Documents Administratifs) pour lui demander d’intervenir, afin d’obtenir ces documents :
C.A.D.A.
35 rue Saint-Dominique
75700 Paris 07 SP
Je vous souhaite bon courage si vous avez des doutes dans votre commune et si vous vous lancez là-dedans, mais c’est tout à fait nécessaire si l’on veut se battre pour une « démocratie durable », qui ramène les électeurs vers les urnes avec confiance en leurs élus (je sors tout juste d’une législative partielle avec 77 % d’abstention au 1er tour et 74 % au second…).
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